Le 15 juin 2018, Nathanaël a quitté son poste de directeur de l’association et directeur adjoint de la fédération Grandira (Grandir Ailleurs, Grandes Latitudes et Grandir Aventure). Une belle page se tourne… Après des au revoir riches en émotions à Antsirabe et à Noisy Le Grand, revenons avec lui sur ses 4 années à Madagascar : ses missions, son engagement social, sa vision de l’avenir de l’organisation.
Nathanaël, pourquoi Grandir Ailleurs et pas une autre ?
L’offre de Grandir Ailleurs réunissait 3 de mes envies : œuvrer à destination des enfants des rues, sujet qui me touche particulièrement, travailler dans le tourisme solidaire et m’investir dans une association à la recherche d’autonomie. C’était une petite ONG avec de grandes ambitions qu’il fallait faire grandir.
Tu as travaillé pendant 4 ans. Quelles étaient tes principales missions ?
Elles se comptent au nombre de 4. Quand je suis arrivé à Antsirabé, un internat accueillait des filles et des garçons qui n’étaient pas en rupture totale avec leur famille. En revanche, aucune structure n’existait pour accueillir les enfants de plus de 10 ans qui dormaient dans la rue. Nous avons alors revu nos objectifs pour être au plus proche des besoins, d’où la nécessité de monter un projet autour de la construction d’un Centre d’Hébergement Temporaire.
Il y avait aussi besoin de structurer la communication. Depuis 10 ans, de beaux projets naissaient mais nous ne les mettions pas assez en valeur. Nous avons donc conçu un site internet, retravailler les logos et créer une newsletter.
Ma troisième mission consistait à trouver des financements avec l’équipe.
Nous avions le désir également de s’affranchir des loyers et d’avoir notre propre bâtiment abritant donc le Centre d’Hébergement Temporaire (CHT), nos bureaux, l’agence de voyages solidaires et le réseau OSCAPE.
En parallèle, nous avons restructuré les activités génératrices de revenus comme les agences de voyages et la boutique.
Dans quelques jours, tu quittes l’association. Quel est ton ressenti ?
Je me sens avant tout satisfait. Du travail accompli par l’équipe, de l’autonomie acquise par chaque membre du personnel, de la construction du CHT. A présent, le projet pourrait même tourner sans directeur. Néanmoins, nous avons recruté Mathilde car il y a encore des financements à trouver et des dossiers en cours à suivre. Son travail va être légèrement différent du mien. Aujourd’hui, l’association locale Grandir à Antsirabé a trouvé sa dynamique. C’est maintenant à Mathilde de développer Grandir Ailleurs et de trouver de nouvelles ressources.
Tu pars donc satisfait, serein…
Plein d’excitation et j’ai hâte de connaître la suite de l’histoire.
Ton plus beau souvenir à l’association ?
Dernièrement, j’animais avec notre bénévole Julie un atelier Détente et Bien-être pour nos bénéficiaires du CHT les vendredis. Quoi de plus beau que de voir ces enfants se sentir relâchés ou avec un regain d’énergie. Ils grandissent dans un environnement rude avec un rapport au corps complexe et cet atelier leur fait beaucoup de bien. Ces moments ont été très inspirants pour moi et m’ont empli d’émotions.
Cela t’a permis de revenir vers tes premières envies, d’être au contact même avec les enfants…
Exactement ! Je passe beaucoup de temps derrière mon ordinateur alors rien de mieux que cet atelier pour être au plus proche des enfants.
Comment imagines-tu l’avenir de l’association ?
Dans mes rêves, je pense que l’expertise acquise par les équipes tout au long de ces 10 dernières années pourrait être partagée au plus grand nombre, au niveau national et international. Pourquoi ne pas mettre en place une Equipe Mobile d’Aide à Tana, appuyer financièrement et techniquement des projets déjà existants ou permettre à notre coordinatrice du Programme de Protection des enfants des rues d’échanger avec d’autres structures à Lima ou Bogota.
Et ton plus grand rêve ?
Que le projet perdure le plus longtemps possible, qu’il soit pris en charge par la commune au niveau local et par des programmes sociaux au niveau national. Quand j’y réfléchis… que l’association prenne fin car cela signifierait qu’il y aurait les structures suffisantes pour accueillir les enfants des rues ou même qu’il n’en existe plus dans la rue.
L’interview touche presque à sa fin. Mais nous voulons encore en savoir un peu plus sur toi. Si tu étais un héros ?
Gandhi ! C’est un héros, non ? Chacun peut-être un héros en suivant son cœur et en apportant quelque chose de positif à son projet pour changer le monde.
Si tu étais un film ?
La Belle Verte de Coline Serreau. Quelque part dans l’Univers existe une planète où ses habitants vivent en parfaite harmonie. Une des « extra-terrestres » décide pour des raisons personnelles de se rendre sur Terre, alors que tous ces compatriotes ne souhaitent plus y retourner. Ce film nous renvoie l’image de notre monde, peu évolué, où l’on mange encore de la viande, où l’on roule en voiture et où des pays se font encore la guerre.
Une sucrerie ?
Une confiture à la goyave pomme et cannelle. Je dois en avoir une douzaine de pots différents dans mon frigo.
Et une qualité ?
La patience. Ce n’est pas celle qui me définit le mieux mais j’ai appris à la découvrir, ici, à Madagascar, au pays du « Mora Mora ».
Une devise ?
« Que ce qui t’importe te porte. »
Un dernier mot ?
Mon émotion en repensant à mes débuts lors de mes rencontres avec les enfants des rues. Quelle satisfaction d’avoir apporté une petite contribution à l’existence d’une structure qui accueille ces enfants et ceux à venir, qui les protège pour les sortir de la rue.
Encore une fois, un grand merci à Nathanaël pour son engagement et son investissement à toute épreuve. Les équipes de Grandir Ailleurs et de Grandir à Antsirabe lui souhaitent plein de réussite et de bonheur pour ses projets futurs !
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